Le 19/09/2019
L’épicerie en vrac, bio et zéro-déchets Please Like Meal à Bruxelles
L’aventure Tandem Local touche bientôt à sa fin. Il nous reste cependant un bout de territoire belge à couvrir avant de clore ce tour débuté le 15 juillet dernier : la région de Bruxelles. Un “bout” de territoire qui accueille tout de même près de 1.212.000 habitants selon les données du Service public fédéral Intérieur. Sa population ne cesse d’accroître d’une année sur l’autre, un phénomène qui s’explique notamment en raison du taux de natalité plus important qu’au sein des deux autres régions, ainsi que du flux migratoire interne.
Pour nous y rendre, nous empruntons la voie rapide dédiée aux cyclistes reliant Louvain à Bruxelles qui s’étend sur 26 kilomètres. Une expérience détonante et positive, bien que nous lui préférions les chemins de campagne et leur calme ambiant.
Une question nous taraude : Comment faire pour nourrir une région aussi peuplée à base de produits locaux, sains et de saison?
En réalité, ce ne sont pas les idées, les bonnes adresses, les ambitions et les appels à projets qui manquent. Jardins potagers urbains sur la terre ferme ou dans les airs, ateliers et formations à l’alimentation durable, reconversion de terrains en friche en espaces agro-écologiques… Habitants de la ville et de la campagne n’ont jamais été aussi proches.
Et si vous n’avez pas vraiment la main verte, vous pouvez toujours vous tourner vers les magasins et épiceries proposant des produits bio, locaux et éthiques, à l’image de Please Like Meal, située dans le quartier Wand, au nord de la capitale. Ses deux créateurs, Xavier Wyns et Tim Van Crombruggen, se sont lancés dans ce projet au début de l’année 2019. Leur désir ? “Promouvoir les agriculteurs et les artisans locaux, mettre en valeur les produits de chez nous mais surtout proposer des aliments sains”.
Produits en vrac, légumes et fruits issus d’une ferme et d’exploitations proches, boissons artisanales, fromages belges… Les rayons consacrés à l’alimentation avoisinent les produits d’entretien et de soins corporels à base d’ingrédients naturels. Tim et Xavier encouragent leurs clients à venir munis de leurs bocaux et autres contenants pour s’approvisionner selon leur besoin.
Sur place, nous y avons retrouvé Géraldine Rémy, auteure du livre “Les secrets de la licorne : Minimalisme et résilience : vers une transition écologique” et fidèle cliente de l’épicerie. “Ce lieu a attiré mon attention pour plein de raisons. Manger local dans son coin me paraît stéril. Ici il y’a une véritable réflexion de la part de l’équipe, qui encourage un max le zéro-déchets et les produits locaux”. Pour cette ancienne enseignante de français, l’alimentation locale est au coeur de tous les enjeux “Je ressens beaucoup de colère quant au fait que le sujet ne soit pas davantage abordé dans les écoles. Quand je vois des élèves boire des sodas je me dis qu’on a raté un truc. Où a ton échoué ? Comment faire pour rectifier le tir ? Comment faire pour faire manger local, pour que les jeunes et les adultes se reconnectent à la nature? Nous sommes devenus analphabètes avec notre environnement”.
Bien que la nourriture saine et locale soit de plus en plus accessible, nombreuses sont les personnes encore aujourd’hui à s’en détourner, invoquant principalement son coût élevé. Comme Géraldine, nous croyons nous aussi que pour que l’alimentation locale devienne l’affaire de tous, les jeunes têtes doivent y être initiées dès le plus jeune âge. Et pour lutter contre l’analphabetisme environnemental actuel lourd de conséquences, pourquoi ne pas rajouter le manuel de Géraldine dans le programme scolaire ?
Le 26/11/2019
La Coopérative Terroirist à Saint-Gilles
Au cours de notre périple, nous sommes allés à la rencontre d’une multitude de producteurs et de commerçants. La famille Manger local ne saurait pour autant être complète sans la présence d’un autre membre à qui l’on pense moins mais dont la fonction n’est pas à balayer d’un revers, surtout dans une ville comme Bruxelles où la demande est bien plus importante que dans le reste du pays.
Ce membre, c’est le distributeur. Pour beaucoup, le circuit-court signifie aucun intermédiaire entre le producteur et le consommateur. Néanmoins, afin de permettre à l’agriculteur, à l’instar du maraîcher, de se consacrer entièrement au travail de la terre, il faudrait que le consommateur se déplace directement chez lui, ce que peu de personnes peuvent se permettre, faute de temps principalement. Qui plus est cette option ne résoudrait en rien la diminution de l’empreinte carbone alors augmenté par l’usage de la voiture, qui demeurerait le principal moyen de transport à cet effet.
La coopérative Terroirist, “née il y’a trois ans de la volonté de magasins bruxellois d’organiser la distribution en amont en lien avec les producteurs locaux” cherche à créer un équilibre entre la demande croissante d’une alimentation de meilleure qualité et responsable, et les besoins du producteur, “qui n’a pas toujours une production suffisante pour approvisionner les grossistes”. Terroirist prend donc en charge la partie logistique et commerciale dont beaucoup de producteurs se passeraient volontiers, et livre auprès des magasins et restaurants en quête de produits frais et sains.
Le fondateur de ce grossiste éthique et solidaire, Thibault Godet, prône une sensibilisation nécessaire auprès des restaurateurs qui, à l’instar de beaucoup d’entre nous, ont perdu la notion du cycle des saisons. La synergie qui résulte de la rencontre entre les différents acteurs avec lesquels la coopérative travaille permet cette reconnexion à la nature ainsi qu’une meilleure compréhension des difficultés de chacun.
A Bruxelles, manger bio et/ou local est devenu tendance et par conséquent de plus en plus accessible. Selon Thibault, les citoyens doivent néanmoins éviter de tomber dans certains pièges. “Depuis quelques années, les magasins bio se sont multipliés et les gens en trouvent facilement près de chez eux. Un magasin bio n’a cependant pas le même impact que de fournir par panier ou près du producteur. Des producteurs s’en sortent mais on perd en diversité et en résilience car ce système reste trop attaché à la demande”. En réalité, c’est la préservation du sol, que l’agriculture biologique (entendez le bio “conventionnel”) contribue à détériorer par le travail intense de la terre, qui devrait primer sur le reste. La qualité nutritive des aliments et la diminution du bilan carbone sont en jeux.
Force est de constater qu’à Bruxelles, la transition consommatrice est en marche depuis plusieurs années. L’envie des citoyens de se diriger vers des produits de meilleure qualité, issus d’une agriculture “durable”, est palpable, donnant naissance à une offre abondante, qui entraîne avec elle une demande de plus en plus forte et de nouveaux enjeux à prendre en considération.
“La clé c’est les citoyens qui l’ont. Il faut se documenter, éviter les simplismes et se renseigner. Redécouvrir le cycle des saisons, ne pas hésiter à demander aux magasins. Avoir un esprit critique pour ne pas se laisser borner, de façon à sortir des pièges. C’est la demande du consommateur qui ajuste tout.”